vendredi 20 juillet 2007

TURCOMANS IRAKIENS - Amirli, village turcoman martyr

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Friday, July 20, 2007
TURCOMANS IRAKIENS
Amirli, village turcoman martyr
par Gilles Munier

Le 7 juillet dernier, un camion piégé a explosé à Amirli, gros village situé approximativement à mi chemin entre Bagdad et Kirkouk. Plus de 140 habitants ont été tués. 250 personnes ont été blessées. Les plus gravement touchées ont été évacuées par avion vers des hôpitaux turcs. Le centre du bourg est ravagé.

L’attentat - un des plus sauvages de l’histoire récente de l’Irak - n’a pas été revendiqué. Comme il fallait s’y attendre, les Américains et le « Premier ministre » Nouri Al-Maliki ont accusé « Al-Qaïda en Irak » de l’avoir perpétré. Cette hypothèse est partagée par le chef de la police locale – donc pro gouvernemental - qui accuse un village voisin, à majorité sunnite, du massacre. C’est, dit-il, un repaire de « terroristes membres d’Al-Qaïda ».

Mais, comme lors de la destruction du sanctuaire de Samarra ou du tombeau de Talhah – compagnon du Prophète - les criminels ne sont pas nécessairement ceux désignés par les forces d’occupation.

Amirli - 11 000 habitants - est peuplé de Turcomans, pour la plupart chiites, qui vivent en bonne entente avec leurs voisins. Pour les Turcomans, le patriotisme irakien et l’appartenance communautaire priment généralement sur les convictions religieuses. Seule une petite minorité de Turcomans, descendant d’une secte safavide persane, est résolument pro iranienne.

Dans ce genre de contexte, la première question à se poser, est : « A qui profite le crime ? ».

Les enjeux, dans cette partie de l’Irak, sont au moins de deux ordres : l’adsorption de la région de Kirkouk par la Région autonome du Kurdistan, la recherche et l’exploitation de nouveaux champs pétroliers sur des territoires peuplés de Turcomans et revendiqués par les Kurdes.
La deuxième question à se poser est : « Qui, sur le terrain, peut s’opposer à la réalisation de ces projets ? ». Réponse : « Les Arabes et les Turcomans ».

A moins d’une provocation, toujours possible – et dans ce cas elle peut aussi bien être iranienne (1), israélienne ou américaine - on ne voit pas pourquoi un mouvement de résistance – y compris salafiste – perpétrerait un attentat aussi sanglant. En revanche, on sait que les services secrets kurdes font tout pour semer la terreur ou la discorde au sein des minorités qu’ils veulent expulser des régions revendiquées par Massoud Barzani et Jalal Talabani. Est-ce un hasard si le sous-sol de la région de Tuz Kurmatu, où est situé Amerli, est riche en pétrole?

En Belgique, des intellectuels turcomans laissent clairement entendre que l’attentat pourrait être d’origine kurde (2).

Une lettre anonyme diffusée le 10 juillet par le site Albasrah.net, proche de la résistance baasiste - où l’auteur cherche visiblement à brouiller la piste remontant à lui - va également dans ce sens : un peshmerga, horrifié par l’ampleur du massacre, accuse sa hiérarchie de lui avoir ordonné de garer le camion – piégé à son insu - au centre d’Amirli. Selon lui, un autre militaire devait prendre en charge le véhicule et le convoyer jusqu’à Bagdad. L’attentat commis le 16 juillet à Kirkouk contre un bureau de l’UPK est interprété comme un avertissement donné aux commanditaires du massacre.

Comme c’est toujours le cas en Irak, l’enquête – si on peut appeler cela une enquête – tournera court car elle implique des investigations dans des sphères inaccessibles au commun des policiers… sauf s’il est suicidaire !

(AFI – Flash n°75 – août 07)

(1) Le Kararheh Ramazan – service secret des Pasdarans iraniens – dispose d’une antenne très active à Soulimaniya, capitale de la partie du Kurdistan où Jalal Talabani règne en maitre.
(2) Turkmens protesting against CNN’s misinformation, par Hassan Aydinli (8/7/07)
http://turkmenfriendship.blogspot.com/2007/07/turkmens-protesting-against-cnns.html

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